YASMINA BEHAGLE - "CHARDON CHÉRI"

"Une phrase, une bruine dans son corps. Tout ce qu’elle n’était pas résidait dans ce nom. Il pensait à toutes les fois où sa femme s’était endormie dans ses bras, qu’elle avait ri à ses mauvaises blagues, qu’il l’avait aidé à plier les draps, ou accompagné à un rendez-vous à la banque, merde, toutes ces fois où ils s’étaient aimés sans le dire. Jamais il ne pourrait faire les mêmes choses sans y penser." p.167 (e-book)
Ma découverte de l'auteure
Un peu avant les vacances d'été, j'ai eu un gros coup de cœur pour un roman en deux parties, intitulées "Leur mère à toutes" et "Au nom de la mère". Après publication de ma chronique, l'auteure m'a gentiment proposé la lecture d'un autre de ses livres au choix ; j'ai rapidement sélectionné et reçu "Chardon chéri". Je remercie donc encore une fois Yasmina Behagle pour ces envois numériques et nos échanges si sympathiques.
Mon résumé
Désemparée face à la dépression de Robin, sa femme l'envoie passer quelques jours chez sa mère dans le Gers. De retour dans la maison de son enfance, l'écrivain se retrouve vite coincé entre les souvenirs douloureux de son père mort et la disparition inquiétante de son amour de jeunesse. En panne d'inspiration, Robin voit dans ce fait divers l'occasion d'écrire à nouveau et de résoudre un mystère qui l'intrigue profondément tout en le détournant de ses problèmes actuels.
ATTENTION SPOILER : au fil de ses investigations, il réalise que tous les proches de la jeune femme constituent des coupables idéals. Entre addiction, jalousie et opportunisme, qui est réellement Nour ?
Les points positifs
Ce roman atypique se compose de vingt-sept chapitres numérotés d'environ treize pages, entrecoupés aléatoirement de chapitres titrés entre trois et sept pages. Alors que les premiers dévoilent la vie de Robin par les yeux d'un narrateur externe et omniscient, les seconds décrivent la captivité et les pensées de Nour via la première personne. Cette double narration, à la fois originale et efficace, répond progressivement aux questions du lecteur et de l'écrivain.
Ce personnage principal m'a d'ailleurs donné du fil à retordre ; je n'ai pas réussi à m'attacher à lui ou à l'apprécier car il ne dévoile que très peu ses sentiments et agit la plupart du temps comme un automate. Ce comportement l'oppose ouvertement aux quatre personnages féminins mis en avant : Alice, Valérie, Nour et Lise, qui m'ont énormément marquée par leur force de caractère et leur indépendance.
En outre, le style d'écriture, à la fois mordant et bien travaillé, m'a beaucoup plu, comme l'utilisation parfaite de l'italique. Les réflexions de Robin sur l'élaboration de son nouveau livre m'ont aussi paru très intéressantes. Elles mettent en exergue le processus créateur en général, en dévoilent les difficultés, les peurs et les résultats parfois hasardeux.
Pour finir, j'ai vraiment apprécié l'accélération soudaine des révélations vers le chapitre vingt-quatre. La narration jusqu'alors plate et désincarnée s'emballe totalement et révèle au lecteur les dessous du fait divers au centre de l'histoire. J'ai été agréablement surprise par le dénouement et complètement satisfaite par la fin en suspens.
Les points négatifs
Au début, j'ai eu beaucoup de mal à cerner l'intrigue ; les informations des premiers chapitres se succèdent de manière confuse et burlesque. La construction de certaines phrases a également contribué à ce sentiment d'incompréhension qui s'estompe heureusement au fil des pages.
La durée de ma lecture
Cinq jours.
Ma note
Une lecture atypique, tantôt légère, tantôt profonde : 4/5.
Informations de publication
2021, Auto-édition, -, 284 pages (e-book), ISBN 979-8503736199.